Date de sortie : 01.09.2025
Label : Humus Records

 

https://hummusrecords.bandcamp.com/album/violent-god
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De la rencontre entre le post-hardcore et la brutalité mécanique de l'électro-industriel vous ne pouvez obtenir qu’un résultat qui détonne. Violent God, premier opus de Pain Magazine sorti le 1er septembre 2025 chez Humus Records, incarne cette collision frontale entre deux univers. Fruit d'une alchimie entre le trio Birds in Row et le duo Maelstrom & Louisahhh, ce disque refuse toute complaisance. C’est une déflagration sonore qui malmène et envoute.

L'album s'ouvre sur son titre éponyme : des nappes synthétiques tranchantes enveloppent des structures guitares abrasives, créant d'emblée une atmosphère où le froid vous envahit sans complaisance. Cette sensation ne vous quittera jamais tout au long des onze compositions. La voix de Louisahhh traverse cet univers comme une lame, déchirante et impérieuse, tandis que celle de Quentin Sauvé apporte une rugosité post-hardcore qui ancre l'ensemble dans une violence organique.

La production signée Joris Saïdani mérite une attention particulière. Chaque élément trouve sa place dans un équilibre qui semble précaire mais parfaitement juste et maîtrisé, où les guitares de Bart Balboa et Quentin Sauvé dialoguent avec les textures électroniques de Joan-Mael Péneau. Cette précision dans le mixage permet aux breaks soudains et aux transitions abruptes de frapper avec une efficacité redoutable, maintenant une tension permanente qui ne relâche son étreinte qu'à de rares moments stratégiques.

Si Weak and Predatory prolonge l'atmosphère oppressante inaugurale avec ses rythmes saccadés, c'est Dead Meat qui opère le premier virage surprenant. Le tempo s'accélère, devient presque dansant, une ironie mordante qui transforme la noirceur en mouvement sans jamais la diluer. La batterie vous invite à réagir malgré le malaise ambiant, créant une dissonance entre l'envie de bouger et l'inconfort viscéral. Dead Meat parle d'une relation toxique marquée par l'agression passive et l'épuisement émotionnel, où la narratrice décrit sa libération d'une dépendance destructrice. À travers des images percutantes de gestes vains et de dangers auto-infligés, le morceau célèbre une rupture cathartique avec un passé relationnel étouffant.

Nice Guy s'inscrit dans une dynamique hypnotique, litanie glaciale portée par un beat électronique, comme un rituel mécanique aux contours gothiques. Puis Like a Storm offre une respiration nécessaire, un passage plus aérien où les nappes électroniques évoquent des ciels orageux et des horizons dystopiques. Cette parenthèse délicate ne dure guère : Choke Points, avec ses six minutes de transe cybernétique, vous replonge dans un maelström répétitif et étouffant, où les couches sonores s'accumulent.

Horse Song est chargé d’émotion. Le dialogue vocal entre chants masculin et féminin atteint ici un sublime équilibre, porté par une instrumentation qui conserve sa froideur tout en laissant transparaître une mélancolie désarmante.

Dans Violent God ,les textes explorent les territoires troubles de la psyché humaine : dépendance émotionnelle, fascination pour la violence, questionnement spirituel torturé. Le titre Violent God interroge la fascination pour une force destructrice et la soumission volontaire à ce qui nous consume, oscillant entre désir et culpabilité. Le morceau explore l'attraction irrésistible vers ce qui nous fait mal, questionnant cette forme de dévotion toxique qui nous met à genoux tout en nous maintenant captifs de nos propres pulsions autodestructrices.

Cette franchise confine parfois à la confession sans filtre. La vulnérabilité affleure sans complaisance, la colère s'exprime sans artifice, créant un propos qui frappe par sa sincérité. L'album se clôt sur Husk, morceau revendicatif qui maintient jusqu'au bout l'équilibre entre froideur électronique et charge émotionnelle.

Pain Magazine ne cherche manifestement pas à reproduire les formules de ses groupes fondateurs, mais forge une entité nouvelle, reconnaissable entre mille. Le groupe dépasse ses références pour imposer une signature propre. Cette capacité à fusionner l'organique et le mécanique, le chaos et la structure, la rage et la vulnérabilité, constitue la véritable réussite de Violent God.

Cet album sollicite autant le corps que l'esprit. Son intensité déstabilise, mais ceux qui accepteront de s'y confronter découvriront une œuvre d'une rare puissance. Violent God nous rappelle que la musique peut encore être un passage à travers les ténèbres dont on ressort différent.

Pain Magazine signe ici un premier album d'une cohérence et d'une audace remarquables, posant les fondations d'une démarche artistique qui refuse les compromis. Reste à voir comment le groupe fera évoluer cette formule explosive, mais une chose est certaine : avec Violent God, ils ont redéfini les possibles du mariage entre post-hardcore et électronique industrielle.

Xavier