Date de sortie : 12.06.2024

 

  • Auteur : Marco Itri
  • Scénariste : Jean-Luc Istin
  • Série - Saga : West fantasy
  • EAN : 9782385610531

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Dans ce deuxième opus de West Fantasy, Jean-Luc Istin, Marto Itri, et Olivier Heban nous transportent à nouveau dans cet univers où la poussière du Far West se mêle à la magie d’un monde sans pitié. Loin des clichés de la fantasy traditionnelle, cette série se distingue par son ton résolument sombre, où la vie humaine n’a de valeur que celle inscrite sur une affiche de recherche. L’aventure est impitoyable, et les motivations des personnages sont tout aussi brutales que le monde qui les entoure.

 L’histoire s’articule autour de trois protagonistes aux trajectoires aussi distinctes que fatales. D’un côté, nous avons l’elfe Isha, une guerrière-shaman, déterminée à venger le massacre de son village par une bande de mercenaires sans foi ni loi. Le Borgne, Deadface, et le Manchot, ces noms résonnent comme une litanie de la mort pour Isha, qui n’a qu’un seul but : leur faire payer le prix du sang versé. Isha, rongée par la haine, n’a que faire de la justice ou de la morale. Elle ne cherche qu’à satisfaire sa vengeance, quitte à se perdre elle-même dans les méandres de sa quête. Le Far West de Jean Luc Istin est un territoire dénué de toute notion d'honneur, inutile de parler de morale. L’elfe se voit contrainte de naviguer dans ce monde dans lequel la violence est la seule monnaie d’échange.

 En parallèle, le marshal Douglas Reeves se débat avec ses propres démons, littéralement. Possédé par un Wendigo, une créature mythique avide de sang, il n’est plus maître de ses actions. Chaque meurtre qu’il commet est une offrande à la bête qui le hante, transformant Douglas Reeves en une machine à tuer incontrôlable. Sa lutte intérieure est aussi poignante que terrifiante, alors qu’il tente de maintenir une façade de respectabilité tout en succombant progressivement à la soif de carnage du Wendigo. Le marshal incarne à la perfection cette dualité entre l’homme de loi et le monstre, ce qui rappelle que dans cet univers, même ceux censés protéger sont irrémédiablement corrompus par le mal.

 Enfin, le gobelin Shiinkel, que les lecteurs ont découvert dans le premier tome, revient dans ce second volet avec un rôle aussi crucial que morbide. Shiinkel, avec son appétit insatiable pour les cadavres, trouve sa place dans ce monde déshumanisé. Son rôle de "nettoyeur" pour Douglas Reeves est aussi macabre qu’essentiel, car il permet au marshal de faire disparaître certaines preuves de ses exactions. Mais Shiinkel ne se contente pas de bouffer les restes ; il est également l’œil vigilant qui surveille les failles de Reeves, prêt à exploiter la moindre faiblesse pour son propre intérêt. Ce personnage apporte une dimension de noirceur supplémentaire à l’histoire, en illustrant la manière dont la violence et la mort sont intégrées à la routine quotidienne dans cet univers.

 La force de ce tome réside dans la manière dont Jean Luc Istin parvient à entremêler les destins de ces trois protagonistes. Leur collaboration, si on peut l’appeler ainsi, est fondée non pas sur la confiance ou l’amitié, mais sur un besoin mutuel de survivre et d’accomplir leurs objectifs respectifs. L’elfe, le marshal possédé et le gobelin n’ont rien en commun si ce n’est leur plongée dans la violence, la vengeance et la corruption. Leur alliance, qui semble aussi fragile que contre-nature, est un miroir de ce Far West où les alliances ne sont que temporaires, et où chacun attend l’opportunité de trahir l’autre.

 Les thèmes de la mort, du racisme et de la violence sont abordés sans détour par les auteurs. Dans ce monde de fantasy, chaque créature est jugée par sa race, et la survie passe par la loi du plus fort. Les discriminations sont légion, et chaque interaction entre les personnages est imprégnée de méfiance et de haine. Le Far West de West Fantasy n’est pas un lieu de rédemption, mais un territoire où la brutalité est la norme et où l’espoir n’a pas sa place.

 Le dessin de Marto Itri, sublimé par les couleurs d’Olivier Heban, parvient à capturer cette atmosphère pesante et oppressante. Les paysages arides, les visages marqués par la haine ou la souffrance, et les scènes de violence crue sont autant d’éléments qui renforcent l’immersion dans ce monde impitoyable. Chaque page est une œuvre d’art qui traduit à la perfection l’âpreté de l’univers créé par Istin.

 Ce second tome de West Fantasy ne fait pas dans la demi-mesure. Il pousse les personnages et les lecteurs dans leurs derniers retranchements, les confrontant à la réalité brutale d’un Far West sans foi ni loi. Pour ceux qui recherchent une aventure intense, sombre et magnifiquement illustrée, ce tome est une lecture incontournable.

 

Xavier